Une Semaine en Haïti – n° 705– Lundi
07 juin 2004
Un convoi de camions a pu atteindre Fonds Verrettes
Début de la mission de l'ONU
Arrivée des premiers casques bleus
Un ancien président du Sénat incarcéré aux Etats-Unis
Situation inquiétante dans des sections de Saint-Michel-de-l'Attalaye
Jean-Bertrand Aristide s'est installé en Afrique du sud
>>> Un convoi de camions a pu atteindre Fonds Verrettes
Un convoi de 11 camions, transportant une aide d'urgence du Programme alimentaire mondial, a pu arriver le 3 juin à Fonds-Verrettes. Une autre bourgade, Mapou, qui fut encore davantage touchée par les inondations, reste inaccessible par la route.
Le nouveau bilan de la catastrophe s'élève à 1191 morts en Haïti. En outre, 1184 personnes sont toujours portées disparues. Ce dernier bilan provisoire fait également état de plus de 31000 sinistrés et de 2400 maisons détruites par les eaux.
Un des responsables du Comité international de la Croix-Rouge en Haïti, Jean-Jacques Frésard, propose que les habitants de quatre localités voisines de Mapou, Barrois, Nan Galette, Nan Roche et Saint-Michel quittent leurs maisons et soient logées temporairement sur des collines dans des abris provisoires. Il estime qu'en cas de nouvelles pluies, ces quatre localités pourraient être submergées par des amas de pierres et de terre instables.
Le 31 mai, le Programme alimentaire mondial a déploré la décision de la force multinationale d'arrêter les rotations d'hélicoptères quotidiennes vers Mapou, estimant que la survie de 15.000 familles dans cette localité était menacée. Les militaires de la force multinationale "considèrent qu'il n'y a plus d'urgence" alors que "pour nous il y a urgence" et "c'est là qu'est le problème", a ajouté le responsable du Programme alimentaire mondial.
Une collecte de fonds en solidarité aux victimes a rapporté en une journée 12,5 millions de gourdes, Le marathon a été organisé sous l'égide de la Chambre de commerce haïtiano-américaine, avec la participation de nombreux secteurs de la vie nationale, notamment des artistes. Le gouvernement canadien a annoncé une nouvelle aide de 900000 dollars canadiens pour les sinistrés.
>>> Début de la mission de l'ONU
Le 1 er juin, lors d'une cérémonie symbolique, la force de sécurité multinationale, sous commandement des Etats-Unis, a transféré son autorité à la nouvelle Mission de stabilisation des Nations unies (MINUSTHA).
Un message de Kofi Annan, le secrétaire général des Nations unies, a été lu lors de la cérémonie. Il a déclaré que l'Onu était "prête à agir avec Haïti et son peuple pour sortir le pays de la situation critique dans laquelle il se trouve actuellement et assurer sa viabilité dans l'avenir"."La tâche est immense, nous comptons sur vous, vous pouvez compter sur nous", a répondu le Premier ministre, Gérard Latortue. "La force de sécurité multinationale a permis de limiter les dégâts (...) Il reste encore beaucoup à faire pour désarmer les gangs armés, enrayer le phénomène de kidnappings et combattre le trafic illicite de stupéfiants", a ajouté le premier ministre.
Si la nouvelle mission de l'Onu a débuté le 1 er juin, ses moyens militaires et policiers ne seront pas opérationnels avant au moins fin juin. "C'est un transfert d'autorité, pas de responsabilités", a précisé Toussaint Kongo-Doudou, le porte-parole de la Minustha. "Son travail sera très difficile mais nous sommes ici pour vaincre les situations difficiles", a déclaré le commandant de sa composante militaire, le général brésilien Augusto Heleno. Il a affirmé que le désarmement serait l'une des priorités de la MINUSTAH.
Après la cérémonie, les soldats chiliens et brésiliens qui faisaient partie de la force multinationale ont changé de couvre-chef pour adopter le béret bleu des Nations unies.
>>> Arrivée des premiers casques bleus
Issus d'une trentaine de pays, casques bleus et policiers arriveront en Haïti progressivement, au fur et à mesure du départ des militaires américains et français qui constituaient le gros des troupes de la force multinationale. Les trois pays fournissant le plus grand nombre de casques bleus seraient le Brésil avec 1600 hommes et le Rwanda et le Népal avec 750 hommes chacun.
Le président brésilien Luiz Inacio da Silva, dit Lula, a salué le 30 mai le départ d'un contingent des 120 premiers militaires brésiliens pour Haïti. "Haïti est le troisième pays d'Amérique Latine avec la plus grande population noire et le Brésil partage cet héritage africain; donc il ne pouvait rester indifférent aux problèmes auxquels le peuple haïtien est confronté", a affirmé le président brésilien.
Le premier ministre de Trinidad-et-Tobago, Patrick Manning, a déclaré que finalement son pays ne participera pas à la composante militaire de la mission de l'ONU, car selon lui il y a trop d'incertitude sur le rôle que les soldats de la CARICOM auraient à jouer.
La Minustha comporte 3 volets : militaire, policier et reconstruction. Son responsable n'est pas encore nommé. Gérard Latortue a indiqué qu'il souhaitait que les Nations unies lui soumettent les noms de plusieurs candidats.
>>> Un ancien président du Sénat incarcéré aux Etats-Unis
Un ancien président du Sénat, élu en mai 2000, Fourel Célestin, s'est rendu aux agents du service-antidrogue à l'ambassade américaine, le mardi 1er juin. Il a été transféré aux Etats-Unis le jour même, à bord d'un avion spécial, afin de répondre aux questions de la justice américaine. Haïti et les Etats-Unis ont signé un accord de coopération pour combattre les trafiquants de stupéfiants en 1997.
Fourel Célestin, un ancien colonel de l'armée, proche de Jean-Bertrand Aristide, était recherché depuis la perquisition effectuée à son domicile le 25 mai. Alors qu'il était déjà soupçonné de trafic de drogue, le sénat élu en 1995 s'était opposé à Jean-Bertrand Aristide, qui voulait en faire le chef de la police.
Fourel Célestin a rejoint en cellule à Miami Evens Brillant, Jean Nesly Lucien, et Rudy Therassan, d'anciens responsables de la police arrêtés ces dernières semaines.
Hermione Léonard, qui était directrice départementale de la police, a été arrêtée le 3 juin en République Dominicaine. Elle faisait l'objet d'un mandat d'arrêt lancé par la justice américaine pour son implication présumée à un trafic de cocaïne partant de la Colombie.
>>> Situation inquiétante dans des sections de Saint-Michel de l'Attalaye
La Plate-forme des organisations de défense des droits humains et la Coalition nationale pour la défense des droits des Haïtiens ont publié un rapport sur la situation régnant dans la commune de Saint-Michel de l'Attalaye. Cette commune, située dans le département de l'Artibonite, est l'une des plus peuplées du pays (135 000 habitants). Elle ne dispose aujourd'hui que de trois policiers..
Au mois de janvier, le mandat des membres des différents Conseils d'Administration des sections communales (CASEC) de St-Michel arrivait à terme. Un Front de Résistance, formé par un homme revenant de l'étranger a décidé alors de combler ce vide. A l'arrivée des anciens militaires à St-Michel de l'Attalaye, ce front a rejoint les insurgés, ce qui leur a permis de contrôler toute la commune. Depuis, une série d'incident ont opposé des hommes armés du Front de Résistance à la population de plusieurs localités. Le bilan est lourd : trois morts, plusieurs blessés par balles, de nombreuses destructions. Les organisations qui sont allées enquêter à Saint-Michel recommandent notamment le jugement des responsables, le démantèlement des gangs armés à travers tout le pays, la nomination de CASEC dans toutes les sections communales, l'installation, dans les meilleur délais possibles, d'une antenne de police dans chacune des sections.
>>> Jean-Bertrand Aristide s'est installé en Afrique du sud
Jean-Bertrand Aristide est arrivé le 31 mai en Afrique du Sud. « Nous avons confiance dans une stabilisation à Haïti et dans le fait qu'il pourra y retourner » a déclaré la ministre sud-africaine des Affaires étrangères.
Le premier ministre Gérard Latortue a indiqué que "les conditions sont réunies pour que Haïti normalise ses relations avec la Jamaïque". Il s'est félicité du fait que le Premier ministre jamaïcain Percival Patterson "ait respecté sa parole et que Jean-Bertrand Aristide n'ait fait aucune déclaration aux médias jamaïcains pendant son séjour".
>>> EN BREF
Un accord aurait été trouvé entre des représentants de Fanmi Lavalas et le premier ministre au sujet d'une commission tripartite devant travailler sur les revendications de ce parti. Il désignerait ensuite son représentant au nouveau conseil électoral. Selon l'AHP, qui donne cette information, un envoyé spécial de l'ONU participait aux discussions, qui doivent encore être finalisées.
Le Comité des avocats pour le respect des libertés individuelles (CARLI) dénonce la détention illégale et prolongée de plusieurs citoyens dans des commissariats de police. Leur libération serait conditionnée au versement de fortes sommes d'argent au commissaire Patrick Israël. Un cameraman de Télé Timoun, Arince Laguerre, a été libéré après 10 jours de détention. Il avait été arrêté le 28 mai sous prétexte que des cartouches de fusil avaient été retrouvées dans sa poche. Il a été libéré après l'intervention d'associations de presse haïtiennes et internationales.
La Confédération des éducateurs d'Haïti (CNEH) demande l'arrestation de certains inspecteurs de l'Education nationale. Selon ce syndicat, malgré la fin du régime Lavalas, ces inspecteurs, de connivence avec des directeurs d'écoles publiques, continuent à toucher les salaires de professeurs décédés ou ayant quitté le pays.
Des individus armés ont semé la panique dans la ville de Petit-Goâve dans la soirée du 1er juin. Ils auraient tiré plusieurs coups de feu sur les maisons de membres de Lafanmi Lavalas. Un policier aurait été blessé par balle alors qu'il dormait
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